La Ve République, avec la personnalité du général de Gaulle et les réformes institutionnelles qu’il a menées, a beaucoup fait pour la personnalisation de la vie politique française. Mais, au moins à gauche, restait l’idée qu’on se rassemblait pour défendre un projet collectif et que, ensuite, on décidait de la personne qui était la mieux placée à l’intérieur du groupe pour porter ces idées devant le reste de la population. Mais c’était toujours le projet collectif qui était mis en avant.
L’évolution, à l’américaine, des mœurs politiques a fait que c’était de plus en plus le porteur du projet que le projet-lui-même qui était sous le feu des projecteurs. Mais, quand il s’agissait de personnalités comme Michel Rocard ou Lionel Jospin, dont les importantes contributions au débat politique étaient largement connues, ce n’était pas trop gênant. Il en est de même à l’échelle locale, où par exemple l’action du maire François Balagéas est suffisamment connue des Eaubonnais pour qu’il n’y ait rien de choquant à ce qu’il mette son nom et sa photo en gros sur des affiches, et il en est évidemment de même pour nous à Soisy avec Luc Strehaiano.
Mais qu’une inconnue qui n’a jamais rien fait dans sa vie politique, qui n’a jamais rien produit ni mené aucune action comme Laura Bérot fasse le même type de campagne est proprement hallucinant. Juste un nom sur une photo sans aucun message de fond. Si encore figurait le logo d’un parti politique, on pourrait admettre que cette personne ne soit rien en elle-même parce qu’elle serait la représentante d’un parti dont les orientations sont connues. Mais là, rien, le néant complet.
Ces pratiques de communication tendent à ramener le débat politique à un jeu de téléréalité où on tape 1, 2 ou 3 selon le look du candidat. C’est une inquiétante dérive, et ce n’est pas pour arriver à un tel résultat que des générations et des générations de militants de gauche se sont battus.