Le président préside, le gouvernement gouverne

« On ne gouvernera pas avec la France insoumise », a encore osé dire Emmanuel Macron hier. Comme si, après tous les dégâts qu’il a faits au pays et en particulier aux plus faibles, il était encore en état de gouverner et de décider qui doit gouverner. Au soir du second tour, il aura la tâche institutionnelle de désigner un Premier ministre. Mais il devra le faire en fonction de ce que décideront les députés nouvellement élus, eux-mêmes devant en discuter avec les instances de leurs partis respectifs.

Le RN étant mis hors-jeu par tous les démocrates, ça sera au bloc le plus important de faire des propositions à celui arrivé derrière. Et donc, comme il est probable et éminemment souhaitable, au Nouveau Front populaire de proposer un ensemble de mesures marquant la rupture mais qui soient néanmoins acceptables par l’ancienne majorité présidentielle pour éviter le chaos qu’induirait l’impossibilité de former un gouvernement.

Il est temps que ce monsieur redescende sur Terre, se rende compte que sa politique et sa façon d’être sont massivement rejetées et qu’enfin il se mette au service au pays en respectant les règles démocratiques comme ont su le faire Mitterrand et Chirac en leur temps.

Qui choisit le Premier ministre ?

Je suis étonné par tout ce qui se dit en ce moment autour du futur Premier ministre : Jordan Bardella pose ses conditions et Jean-Luc Mélenchon, après avoir fait profil bas, laisse réapparaître son naturel autoritaire. L’un comme l’autre semblent croire dur comme fer que c’est leur camp qui choisira. Vraiment ?

Car si effectivement en 1986, 1993 et 1997 François Mitterrand et Jacques Chirac avaient nommé Premier ministre le candidat proposé par la nouvelle majorité (Jacques Chirac, Edouard Balladur et Lionel Jospin), lors de la première cohabitation Mitterrand avait refusé que Jean Lecanuet devienne ministre et refusé d’attribuer le ministère de la Défense à François Léotard (ce qu’il a accepté sept ans plus tard).

Donc, la simple connaissance de l’histoire nous rappelle que c’est le président de la République qui nomme les ministres, y compris le premier d’entre eux : le soir du 16 mars 1986, Mitterrand a annoncé à la télé « j’appellerai, demain, un Premier ministre issu de cette majorité ». Qui peut croire qu’Emmanuel Macron se sentira obligé par le choix du RN, de LFI ou même du Nouveau Front populaire ? Que feront les troupes RN si Macron nomme par exemple Sébastien Chenu ? Ils voteront la censure ? Et s’il nomme Raphaël Glucksmann ou François Ruffin ? Comme en 1936 les communistes, LFI se réfugiera dans le soutien sans participation ?

Comment se fait-il que les divers analystes aient à ce point oublié que c’est le président de la République qui nomme le Premier ministre et n’explorent pas toutes les pistes que permet ce choix ?

Adieu PS, je t’aimais bien…

En ces temps électoraux difficiles, on ne peut s’empêcher d’éprouver une certaine satisfaction à l’annonce des résultats de la primaire organisée par les socialistes : le fait que Manuel Valls, qui n’a jamais été de gauche, ne réunisse même pas un tiers des suffrages sur son nom et arrive derrière Benoît Hamon, a quelque chose de rassurant sur l’état réel de ce que j’ose encore appeler le « peuple de gauche ».

Cette primaire signe vraisemblablement l’acte de décès du PS et, vu ce qu’il est devenu, ce ne peut être que salvateur. Depuis 1905 le Parti socialiste a fait de grandes choses avec entre autres Léon Blum et le Front populaire, puis François Mitterrand avec l’abolition de la peine de mort et Michel Rocard avec les révolutions RMI et CSG, et jusqu’à Lionel Jospin qui a relancé le processus émancipateur de réduction du temps de travail et arrêté le surgénérateur nucléaire Superphénix. Mais, malgré les étiquettes, ce PS-là n’était plus au gouvernement.

Et si les cartes ont été brouillées au point qu’on ne distingue plus guère la différence entre la gauche et la droite, on peut quand même aujourd’hui distinguer deux catégories de responsables politiques : ceux qui font de la politique d’accompagnement — c’est-à-dire en fait qui laissent les puissances financières transnationales faire comme bon leur semble — et ceux qui, conscients de l’injustice sociale et de la finitude de la planète, mettent toutes leurs forces à faire de la politique de transformation.

Dans la catégorie de ceux qui font de la politique d’accompagnement les nuances sont infimes entre Valls, Macron ou Fillon. De l’autre côté, et c’est pour ça que le PS a fini d’exister, se trouvent Hamon, Montebourg, Mélenchon et nous-mêmes à EELV. Nous avons certes des sujets de désaccord. Mais nous avons conscience des vrais problèmes et nous parlons la même langue, donc l’avenir n’est pas forcément complètement noir pour les générations futures.